De tous les thèmes de l’environnement, celui de la pollution des sols et des nappes phréatiques est singulier à plusieurs titres. Il se distingue par la difficulté d’identifier les sources et par conséquent d’en évaluer les impacts et les risques, le caractère persistant voire irréversible des pollutions et l’impact qui peut en résulter sur la valeur patrimoniale d’un site, et le caractère récent de la prise en compte et le manque de maturité scientifique ou réglementaire sur le sujet.
Les pollutions de sols et de nappes sont persistantes, voire irréversibles pour certaines. Ce caractère résulte d’une cinétique d’évolution très lente des mécanismes de dispersion ou de dégradation. L’échelle de temps à considérer dans la recherche des causes ou dans l’évaluation des conséquences se compte en décennies. Les progrès réalisés en matière de prévention dans le secteur industriel font que la plupart des pollutions qui seront traitées dans les vingt années à venir, existent déjà et sont le fait d’activités passées.
Il résulte de cette première observation, que ce type de pollution, contrairement à celles liées aux rejets aqueux, aux émissions atmosphériques ou aux nuisances sonores, persiste au-delà de la cessation d’activité et se transmet avec le site. L’application du principe pollueur-payeur rencontre là une difficulté importante liée au transfert de la responsabilité entre les exploitants successifs, d’une part, et les propriétaires, d’autre part.
L’aspect le plus problématique de la pollution des sols et des nappes est celui du recensement, c’est-à-dire de l’identification des pollutions et de leur caractérisation. Ce préliminaire indispensable se heurte :
• au caractère quasi invisible des sources et de leurs effets ;
• au coût des techniques de reconnaissances ;
• à l’hétérogénéité du milieu considéré.
Afin d’éviter une recherche systématique et coûteuse des pollutions de sol, par un maillage régulier des prélèvements, on préfère généralement s’appuyer sur une recherche historique poussée des activités et des incidents qui ont pu survenir sur le site, avant de définir des programmes de reconnaissances physiques ciblées. Les défauts de mémoire et d’archivage sont compensés par une approche prudente, rigoureuse et plutôt sécuritaire dans les phases d’investigation et d’interprétation.
Cependant, malgré tous les moyens mis en œuvre, un diagnostic de site ne pourra jamais être considéré comme exhaustif.
Un risque difficilement perceptible ou quantifiable :
D’un point de vue environnemental, une même source de pollution peut avoir des conséquences variables en fonction de l’évolution dans le temps de l’usage du site ou de son voisinage. Ainsi, une pollution donnée peut être tolérée pendant plusieurs années sur un site industriel, puis devenir inacceptable si une implantation résidentielle y est envisagée ou si la nappe sur lequel il se trouve devient stratégique pour l’alimentation en eau potable de la région.
Pour cette raison, les autorités françaises ont choisi de ne pas définir de normes strictes définissant à partir de quelle concentration en polluants un sol ou une nappe sont considérés comme pollués et doivent être traités. À l’instar de la plupart des pays industrialisés, l’approche française s’appuie sur le principe de la proportionnalité entre l’action et le risque potentiel. Cette approche est apparue la plus raisonnable aux pouvoirs publics pour concentrer les sommes considérables que ces pollutions mettent en jeu sur les besoins les plus urgents.
La contrepartie de ce choix est la nécessité de développer une méthodologie claire et acceptée par tous pour l’évaluation et l’appréciation du risque.
Des solutions multiples :
Les derniers articles de cette rubrique traitent des solutions qu’il est possible d’apporter aux pollutions du sous-sol.
La caractérisation d’un problème de pollution du sous-sol est complexe et doit faire appel à des techniques précises de plus en plus normalisées. En revanche, la marge de manœuvre pour gérer le problème, une fois caractérisé, est grande. Il n’est pas rare que des aspects socio-économiques sans lien avec l’environnement entre en ligne de compte dans le choix des solutions. Généralement, pour une situation donnée, plusieurs options sont potentiellement acceptables :
• tolérer les impacts ;
• supprimer les cibles potentielles ;
• mettre en place un suivi pour s’assurer d’une dégradation naturelle ;
• confiner (isoler) temporairement ou définitivement la source ;
• enfin traiter de manière définitive la source de pollution et ses effets.
Les techniques de réhabilitation actuellement disponibles sur le marché français sont en plein essor.
Il en résulte un certain manque de maturité technique et des conditions de marché non stabilisées.
La plupart des techniques de dépollution ne permettent pas d’obtenir une garantie.
De nombreux acteurs concernés :
Du fait des incertitudes inhérentes au diagnostic, à l’évaluation du risque ou au choix de la technique de traitement, la solution qui sera mise en œuvre dépend fortement de la gestion des phases d’évaluation et de négociations avec les autres parties prenantes : l’administration, le voisinage, les associations, l’acquéreur ou les employés du site. Le moyen d’atteindre la meilleure adéquation problème/solution implique :
• d’en étudier simultanément tous les aspects : risques environnementaux, enjeux financiers à long terme, usages futurs du site, responsabilité civil et pénal ou risque d’image ;
• de poser le problème au bon moment, si possible, en anticipant afin d’éviter les situations de crise qui peuvent conduire à une surestimation du problème ;
• de s’entourer de toutes les compétences requises pour traiter conjointement les aspects techniques, juridiques et administratifs d’un problème ;
• d’être rigoureux dans la démarche et garder la trace des actions engagées afin de prévenir d’éventuels contentieux dans le futur ;
• d’être prudent dans l’interprétation..